Justice canadienne : le dossier Laurent Lamothe relancé — si les juges confirment l’absence de preuves, le Canada pourrait devoir lever des sanctions imposées depuis 2022
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Trois ans après l’imposition de sanctions canadiennes pour des soupçons de corruption, la justice canadienne a rouvert le dossier de Laurent Salvador Lamothe, ancien Premier ministre haïtien.
Cette relance pourrait, selon les suites judiciaires, conduire à une remise en cause des mesures décidées en 2022 par le gouvernement de Justin Trudeau, accusées d’avoir reposé sur des considérations politiques plutôt que sur des faits établis.
La Cour fédérale du Canada a émis, le 23 octobre 2025, une ordonnance de reprise de procédure dans l’affaire Laurent Salvador Lamothe c. La Gouverneure générale en conseil, la Ministre des Affaires étrangères et le Procureur général du Canada.
Cette décision, rendue à Edmonton (Alberta) par le juge adjoint Shannon, marque une nouvelle étape dans un dossier en suspens depuis janvier 2025.
Le recours du dirigeant haïtien est enregistré sous les numéros T-2697-22 et T-402-24, et vise à contester la légalité des sanctions imposées à son encontre en novembre 2022.
“Mon combat pour la vérité”
Laurent Lamothe a annoncé la nouvelle sur son compte X (anciennement Twitter) avec un message intitulé « Mon combat pour la vérité ».
« Après 3 ans d’attente, la Cour fédérale du Canada relance enfin notre dossier. Le Canada devra répondre de sanctions arbitraires, imposées en 2022 par Justin Trudeau pour tenter — et échouer — à redéfinir le paysage politique haïtien en connivence avec Ariel Henry », a-t-il écrit.
L’ancien Premier ministre, en fonction de 2012 à 2014, rejette toute accusation de corruption et conteste la légitimité des sanctions canadiennes et américaines prises à son encontre.
À ce jour, il demeure le seul responsable haïtien sanctionné à avoir officiellement saisi la justice canadienne pour faire valoir ses droits et tenter de faire lever ces mesures.
Les sanctions prises par le Canada et les États-Unis visaient plusieurs personnalités haïtiennes, soupçonnées d’avoir soutenu des réseaux criminels ou financé des gangs armés.
Mais selon la défense de M. Lamothe, aucune preuve matérielle n’a jamais été présentée pour justifier ces mesures.
Des observateurs voient dans ce dossier une épreuve pour la crédibilité du dispositif canadien de sanctions internationales, notamment lorsqu’elles sont appliquées à des dirigeants politiques étrangers sans procédure contradictoire.
L’ordonnance du 23 octobre ne constitue pas encore un jugement sur le fond, mais elle réactive le processus judiciaire et oblige le gouvernement canadien à justifier la base légale de ses sanctions.
Si la Cour fédérale estime que ces mesures ont été imposées sur la base de rumeurs ou de considérations politiques, cela pourrait ouvrir la voie à leur levée totale.
Une telle décision serait sans précédent, et pourrait affecter la politique canadienne en Haïti, déjà critiquée pour son soutien à l’actuel Premier ministre Ariel Henry.
Ce recours dépasse le seul cadre juridique : il s’inscrit dans un contexte tendu entre Ottawa et plusieurs acteurs de la scène politique haïtienne.
Alors que le Canada affirme vouloir « sanctionner la corruption et l’impunité », plusieurs voix dénoncent une politique d’ingérence et de sélectivité.
Le dossier Lamothe, désormais rouvert, pourrait devenir un test pour la transparence et la crédibilité de la diplomatie canadienne dans la région.

À retenir
Personnalité : Laurent Salvador Lamothe, ancien Premier ministre d’Haïti (2012–2014) Instance : Cour fédérale du Canada Décision : Ordonnance du 23 octobre 2025 relançant le dossier Objet : Contestation des sanctions canadiennes et américaines imposées en 2022 Fait notable : Laurent Lamothe est le seul à avoir entrepris une démarche judiciaire pour contester ces mesures
Prochaine étape : Attente d’une décision sur le fond du dossier