Le Conseil de sécurité de l’ONU prolonge les sanctions contre l’élite haïtienne : Séisme politique et économique à l’horizon.-
4 min readLe Conseil de sécurité des Nations Unies a pris une décision cruciale en votant la résolution 2700 en lien avec le rapport des groupes d’experts sur la sécurité. L’extension d’un an du mandat du comité de sanction sur Haïti s’accompagne de recommandations majeures : des sanctions sévères contre les individus cités dans le rapport, incluant des interdictions de voyage et la saisie de leurs biens et avoirs.
Lors de cette session, les représentants de plusieurs pays ont pressé pour que les noms des personnes sanctionnées soient rendus publics. Dans un document des experts de l’ONU désormais accessible au grand public, des personnalités haïtiennes de haut rang, telles que l’ancien président Michel Joseph Martelly, le député Vistor Prophane, le sénateur Youri Latortue et l’homme d’affaires Reynold Deeb, sont accusés d’être à la tête des gangs du pays.
La tension monte alors que l’ONU envisage de publier la liste complète des personnes sanctionnées le 13 novembre prochain. Cette décision pourrait déclencher un séisme politique et économique en Haïti. À noter que les « patrons des gangs » s’exposent à une possible extradition vers les États-Unis.
le Conseil de Sécurité des Nations Unies, pointe du doigt Michel Joseph Martelly, l’ancien chef d’État, pour ses liens directs et indirects avec des gangs, allant jusqu’à les financer et en créer un, nommé Baz 257 à Pétion Ville. Le document révèle également que Michel Martelly aurait financé et armé plusieurs gangs, notamment Base 257, Village de Dieu, Ti Bois et Grand Ravine, pour soutenir son pouvoir politique. Martelly aurait utilisé des intermédiaires, notamment des membres de sa garde rapprochée, pour établir des relations et négocier avec d’autres gangs.
Selon les constatations du Groupe d’experts, des preuves ont émergé, démontrant que Reynold Deeb, en tant que dirigeant du Groupe Deka, aurait financé des membres de gangs pour assurer la sécurité de ses activités commerciales et garantir le transport sans entraves de ses marchandises importées.
En 2017, M. Deeb aurait rémunéré un chef de gang afin de faciliter ses opérations au sein d’un des principaux ports. Plus récemment, d’après diverses sources indépendantes, il aurait fait pression sur des douaniers portuaires en recourant à des membres de gangs, évitant ainsi l’inspection et la saisie de ses conteneurs, lui permettant ainsi d’échapper à certains droits d’importation. En outre, étant donné que la zone entourant le port de l’Autorité portuaire nationale était sous le contrôle du G9, M. Deeb, à l’instar d’autres importateurs majeurs, aurait versé des sommes aux gangs pour assurer le passage de ses marchandises sur leur territoire.
Le rapport indique qu’entre septembre et décembre 2019, le phénomène du « pays lock », caractérisé par la paralysie des activités économiques, aurait été encouragé par Reynold Deeb et d’autres acteurs économiques soutenant l’opposition politique, à l’origine de cette initiative. Face à cette situation, la demande en produits alimentaires aurait considérablement augmenté. Dans cette optique, le groupe d’experts décrit M. Deeb comme un « entrepreneur opportuniste » qui aurait corrompu des députés. Ces députés auraient ensuite « rémunéré des chefs de gangs pour disperser les manifestants, débloquant ainsi les rues et permettant l’entrée de ses marchandises dans le pays.
Prophane Victor, ancien député de Petite Rivière, est accusé d’armer des jeunes de la région pour soutenir son élection en 2016, ce qui a conduit à la création du gang Gran Grif, le plus important de l’Artibonite, responsable de violations des droits humains, y compris des violences sexuelles.
Youri Latortue, ancien président de l’assemblée nationale, est accusé d’exercer un contrôle considérable dans l’Artibonite et d’avoir financé le gang Kokorat Sans Ras. Il aurait également eu recours à des gangs pour sa protection rapprochée et pour causer des dommages matériels.
Romel Bell, ancien directeur général de l’administration générale des douanes, est accusé de fraude fiscale et d’autres infractions financières, ainsi que de tolérer la corruption dans les processus de contrôle douanier.
Parmi les individus qui seront soumis à des sanctions, on recensera d’anciens parlementaires, des acteurs du secteur privé, des personnalités politiques, et des membres de la société civile. Leurs biens et avoirs seront gelés, et un accord avec Interpol est en préparation pour faciliter leur arrestation, selon des sources internes.
Il est intéressant de noter que le nom de Laurent Lamothe ne semble pas figurer sur cette future liste des « patrons des gangs, » car les allégations de corruption à son encontre n’ont pas pu être prouvées lors des enquêtes menées par l’ONU. Cependant, cette décision soulève des questions sur la complexité des enquêtes de sanctions internationales et leurs implications pour Haïti.