8 septembre 2024

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PetroCaribe: la loi Biden contre la corruption en Haïti fera-t-elle bouger les lignes ?

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Valina Charlier Petrochallenger, Me André Michel, Youri Latortue auteur rappot Petrocaribe, Président Joe Biden, Blaise Robelto Flanky et Lesly Petrochallenger, PM Ariel Heny

Les Etats-Unis, dans une loi signée le 15 mars 2022 par le président Joe Biden, ont demandé au Département d’Etat une évaluation des actes de corruption majeure commis par les secteurs public et privé en Haïti, l’identification de toute personne ou entité ayant financé des activités de corruption, et toutes les poursuites pour corruption ayant fait l’objet d’une enquête par le système judiciaire haïtien depuis janvier 2015.

Cette loi vise également à obtenir un aperçu des efforts déployés par le gouvernement haïtien pour lutter contre la corruption, y compris le scandale PetroCaribe. 

Pour le moment, il est difficile de savoir si les lignes vont bouger dans la lutte contre la corruption et particulièrement concernant le dossier PetroCaribe. Pour certains, il était temps que les USA votent cette loi.  

Il était temps 

Ex-député, ex-sénateur qui s’est retrouvé parmi les tous premiers à dénoncer les actes de corruption et de détournements de fonds provenant de PetroCaribe, Steven Yrvenson Benoît, désigné Premier ministre par l’accord de Montana, interrogé par le journal Le Nouvelliste, a soutenu que les Etats-Unis se sont finalement rendus compte de ce qui se passe. « Le gouvernement américain s’est finalement rendu compte que le gouvernement PHTK est un gouvernement corrompu et que le pays a été systématiquement pillé ces 10 dernières années », a-t-il soutenu.

« Nombre de leaders de ce regroupement criminel vivent aujourd’hui aux USA avec des millions de dollars volés au peuple haïtien », a poursuivi Steven Y. Benoît égrène des expériences décriées avec PetroCaribe, les fonds de la Commission intérimaire pour la reconstruction d’Haïti (CIRH) après le tremblement de terre et les pratiques de corruption dénoncées à l’OAVCT, au FDI, à la douane, etc. 

« L’heure, pour Steven Y. Benoît, est finalement venue de geler ces fonds, d’identifier ces malfrats et d’aider l’État haïtien à faire les différents procès tant attendus par la population et tracer un exemple une fois pour toute ». 

« Les lignes bougent. Nous, au niveau de Montana, nous nous en réjouissons. Notre cri est finalement entendu. Mieux vaut tard que jamais », s’est-il félicité. 

« Les Etats Unis sont en train de redresser les torts faits aux mouvements populaires haïtiens, exigeant la reddition des comptes en général et la poursuite des allégations de corruption dans le rapport Petrocaribe. Cette loi qui provient du législatif des Etats Unis, offre la démonstration d’un système où les Pouvoirs s’équilibrent, tôt ou tard. Sous l’Administration Trump, il s’était avéré impossible de faire respecter les normes de bonne gouvernance par l’Exécutif haïtien, armé d’un arsenal de lobbyistes pour manipuler les faits en la faveur des dirigeants. Aujourd’hui beaucoup de choses ont changé, ce qui force l’Administration américaine à faire le constat de la fulgurante dégradation des conditions en Haïti; et reconnaître que sans des mesures fermes, le régime encore au pouvoir ne s’assainira pas; au contraire », a confié au journal Le Nouvelliste l’ex-sénateur Youri Latortue, auteur du premier rapport, pour le Sénat de la République, sur l’utilisation des fonds Petrocaribe.  

« Comme nous, de nombreux membres du Congrès américain, ainsi que notre diaspora, comprennent que la criminalité locale ne peut se résoudre si la corruption financière publique et privée, n’est pas freinée.  Pour moi, c’est une mesure qui envoie un bon signal, quoique la justice haïtienne doit se mettre à la hauteur. Ce mouvement promet de raviver tous les dossiers d’abus de pouvoir et de détournements de fonds.  Est ce qu’ils aboutiront tous ? Je ne sais pas. Néanmoins, sans un message fort, et des mesures implémentées avec rigueur, nous aurons du mal à corriger les mauvaises pratiques qui continuent de nous appauvrir et de pousser nos enfants vers l’exode massif », a indiqué l’ex-sénateur Youri Latortue.

« Financer le gouvernement que nous avons aujourd’hui, émanation des pratiques qui ont suscité tant de remous au cœur de nos jeunes entre 2019 et 2020, sans l’obliger à se soumettre aux normes de transparence attendue dans la gestion des affaires de l’Etat, équivaut à donner de la drogue à un toxicomane », a-t-il soutenu. 

«Je pense que certaines choses vont bouger. D’ailleurs, la nature même de la vie le demande. De toute façon, c’est un message fort pour indiquer les limites de la tolérance de nos voisins en matière de blanchiment et de violations de droits de l’homme. Quelque chose est en train de changer en effet, par rapport à la position des Etats-Unis qui disaient : fermons les yeux sur les exactions des dirigeants haïtiens car, quoique corrompus, au moins ils se soumettent à notre politique étrangère, notamment en référence au Venezuela et à Taïwan », a indiqué Youri Latortue.

« Au-delà du fait que les États-Unis ont toujours trouvé des prétextes pour ne pas donner de l’argent à ce pays de Nègres qui s’appelle HAÏTI, il faut reconnaître la légitimité et le bien-fondé de cette loi. On ne saurait demander au peuple américain d’accepter que son argent soit utilisé pour financer un pays qui a choisi d’utiliser la corruption et le banditisme comme méthodes de gouvernement », a fait savoir au journal Me André Michel, figure du SDP, avocat de plaignants dans le cadre du dossier PetroCaribe et signataire de l’accord du 11 septembre qui a porté au pouvoir le Premier ministre Ariel Henry et qui a fait du procès PetroCaribe l’un de ses objectifs.  

« J’aurais bien aimé que les États-Unis nous aident dans la lutte contre la corruption. L’argent volé en Haïti par les hommes d’affaires et les politiques est investi aux USA dans des entreprises de toutes sortes », a expliqué celui qui a « initié le procès PetreCaribe le 30 janvier 2018 avec la plainte du citoyen Johnson Colin ».

« Cela me fait plaisir que cette affaire soit évoquée dans une loi américaine. Mais attention, cela ne suffit pas. Le dossier PETROCARIBE est pendant devant deux juridictions différentes en Haïti : la cour d’appel de Port-au- Prince et la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif. Une collaboration américaine avec ces deux juridictions serait parfaitement bienvenue », a signalé Me André Michel.

« La CSCCA a un rôle fondamental à jouer dans la bataille contre la corruption et la mauvaise gouvernance. La lutte contre la corruption et la bonne gouvernance sont deux concepts intimement liés. Malheureusement, la CSCCA intervient toujours après coup au moment de juger les comptes des comptables de fait et de droit ainsi que des ordonnateurs de fait. Lè sa a kabrit la gentan fin pase », a-t-il affirmé. 

« Le pays a besoin d’une CSCCA qui intervient à titre préventif pour éviter le gaspillage des deniers publics. Elle peut intervenir sur l’opportunité des dépenses, sur la légalité des contrats et au moment de l’exécution des contrats. Il nous faut surtout ces types d’intervention pour empêcher les actes de corruption et le gaspillage des fonds publics », a poursuivi André Michel, soulignant avoir « toujours cru que le relèvement d’Haïti passe par la lutte contre la corruption ».

« C’est à nous qu’il appartient de faire bouger les lignes en cette matière. Ce n’est pas vraiment une loi américaine qui viendra changer les choses. Un procès est une affaire de procédure. Le dossier PetroCaribe est pendant devant la justice. Les institutions doivent jouer leur rôle, et ceci, sans aucune ingérence politique. Nous attendons les arrêts de débet de la CSCCA dans le cadre du dossier PetroCaribe. Cela va aider la cour d’appel de Port-au-Prince à mieux faire son travail. Le SDP n’aurait pas signé l’accord du 11 septembre si le dossier PetroCaribe n’y était pas inscrit. Ça fait partie de nos fondamentaux. A mon sens, ce qui doit être fait de concret, c’est d’enlever les obstacles politiques à l’organisation du Procès PetroCaribe pour que les juridictions compétentes puissent jouer leur rôle convenablement », a indiqué Me André Michel.

Mots de la CSCCA

« Je me limite à préciser que, par ses arrêts de débet et ses rapports, la Cour continuera de contribuer à la lutte contre la corruption en mettant à la disposition d’autres institutions établies par la loi des données objectives sur les irrégularités relevées pour leur permettre de réprimer certaines infractions qui relèvent de leur champ de compétence », a confié au journal Le Nouvelliste, Fritz Robert Saint Paul, président de la Cour supérieure des comptes et du contentieux administratif, interrogé sur cette loi signée par le président américain Joe Biden.

L’espoir d’une petrochallenger

« PetroCaribe est l’un des plus grands crimes financiers que le pays ait connus. La lutte contre la corruption a été portée de l’avant par le mouvement anti-corruption des petrochallengers. Cette lutte qui continue et ce dossier qui revient sous les projecteurs sont la preuve que la sensibilisation face à la corruption endémique et systémique a atteint les bailleurs de fonds », a confié au journal Le Nouvelliste Vélina Elysée Charlier, l’une des figures de proue du mouvement des petrochallengers. 

Pour Vélina Elysée Charlier, cette loi américaine suscite de l’espoir. « Cela donne espoir que des mesures sérieuses seront prises par la justice et les institutions concernées pour qu’on en arrive au procès PetroCaribe. On compte, a-t-elle souligné, sur la solidarité internationale dans la lutte contre la corruption que mène le peuple haïtien ». 

« Les lignes bougent mais les véritables résultats dépendent d’une gouvernance axée sur la rupture d’avec les pratiques de corruption. Un pouvoir judiciaire indépendant et muni des moyens financiers et techniques pour poursuivre et punir les coupables. La tourmente nécessaire aux corrompus dépend de la fin du règne de cet État mafieux », a fait savoir Mme Charlier.

« On a toujours dénoncé l’appui que la communauté internationale donne sans cesse à des gouvernements qui nous imposent la corruption, l’impunité et l’insécurité planifiée comme mode de gouvernance », a poursuivi Vélina Elysée Charlier, l’une des figures de l’accord de Montana, qui tance :  « Les Etats-Unis ne peuvent pas continuer à soutenir un gouvernement de facto corrompu et prétendre exiger de ces mêmes corrompus des mesures sérieuses, efficaces, applicables et appliquées contre la corruption. Pour que la contrebande et le pillage des fonds de l’État cessent, il faut s’attaquer aux causes systémiques. Il faut casser le règne de l’impunité et de l’État mafieux », a insisté Vélina Elysée Charlier. Suivez les traces de l’argent. Comme on le dit en anglais, « follow the money ».

« La solidarité internationale est nécessaire, voire indispensable dans toutes les luttes contre la corruption. Les fonds détournés, volés et dilapidés ne sont certainement pas dans des placards ou sous des matelas. Ils ont probablement été investis ailleurs, ou sont dans des comptes bancaires dans des paradis fiscaux. Beaucoup de noms et entreprises cités dans les rapports PetroCaribe ont des intérêts aux Etats-Unis. Ce pays doit donc faire preuve de solidarité réelle et de transparence en initiant des enquêtes chez eux pour retracer les biens et investissements faits avec des fonds provenant de la corruption. Ils doivent aussi fournir un support technique et juridique, tout en respectant les lois internationales en la matière. Les fonds sont là, suivez leur trace et appliquez la loi », a insisté Vélina Elysée Charlier.

Marie Rosie Auguste Ducénat, l’un des responsables du Réseau national de défense des droits humains (RNDDH, une organisation membre du regroupement d’organisations Ensemble contre la corruption, a estimé que cette loi signée par le président Biden, la « loi sur le développement, la responsabilité et la transparence institutionnelle en Haïti » est un document important sur la base duquel des exigences peuvent être faites aux autorités étatiques d’assainir les finances publiques, l’évaluation et la mise en place de mécanismes de transparence et de reddition de comptes peuvent être faites. 

« Les citoyens et citoyennes, soutient Marie Rosie Auguste Ducénat, peuvent aussi jouer leur partition en se basant sur ce document qui touche aussi plusieurs problèmes liés au non-respect et à la non-réalisation des droits humains en général en Haïti, puisque la loi traite aussi des libertés de la presse et de réunion, des droits aux garanties judiciaires des victimes du massacre de La Saline, etc. »

Evocation du scandale PetroCaribe

« Le scandale PetroCaribe reste et demeure un dossier important qui doit être utilisé comme litige stratégique pour résoudre une bonne fois pour toutes les problèmes liés à la grande corruption en Haïti ainsi que le drame de l’impunité, puisque celle-ci favorise aussi bien les crimes financiers que les infractions de droit commun », a ajouté Marie Rosie Auguste Ducénat qui partage un regret. 

« C’est cependant dommage que dans ce dossier particulièrement nos dirigeants ne veulent pas que la vérité soit faite sur la dilapidation du fonds PetroCaribe. L’impression, a soutenu la militante des droits humains, l’un des responsables du RNDDH, est que toute la machine est mise en branle pour empêcher que le dossier aboutisse au jugement des comptes des personnes impliquées et à la condamnation des personnes ayant perpétré des actes de corruption ».

L’engagement citoyen pour faire bouger les lignes  

Interrogée sur la possibilité que des lignes bougent avec cette loi, Marie Rosie Auguste Ducénat a soutenu que « rien ne bougera tant que le pays ne sera pas doté de dirigeants qui comprennent que la relation entre violation des droits humains et corruption doit être interrompue et qu’il faut une autre forme de gouvernance, basée sur le respect des droits humains en général et non sur le règne de la terreur et la gangstérisassions du pays et de l’Etat. Les outils comme la loi susmentionnée sont importants. Mais en plus, il faut, pour des résultats probants, l’engagement citoyen ». 

Peut-être le début d’une nouvelle ère

« On doit s’intéresser aux initiatives des autres pays en matière d’investigation de la corruption en Haïti car nous n’avons pas mis nos devoirs au propre. Les différents rapports sur la corruption en Haïti indexent, accusent et responsabilisent. Jusqu’à présent aucune poursuite judiciaire pour le dossier PetroCaribe, parce que tout simplement la justice est prisonnière des intérêts politiques et économiques qui ne veulent pas faire avancer les choses », a confié au journal l’économiste Etzer Emile, qui est devenu un agitateur d’idées dans le sens d’un engagement citoyen plus marqué dans la gestion de la chose publique.

« Jusqu’ici, malheureusement, il n’y a que le bon Dieu et le Blanc qui donnent justice à ce peuple ou qui puissent pressurer nos dirigeants. Ces derniers sont en fait plus sensibles à une note d’une ambassade que la voix de douze millions d’Haïtiens. Cette nouvelle loi est-elle un simple instrument de pression ou est-ce qu’elle va réellement provoquer des enquêtes sérieuses pouvant aboutir réellement à des condamnations ? s’est interrogé Etzer Émile. « Il n’est que d’attendre. On souhaite bien que cela soit le deuxième cas. Car le jugement sur le dossier PetroCaribe est une obligation pour envoyer des signaux et jeter les bases d’un vrai État de droit ». 

« Il est temps pour nous de divorcer d’avec cette République sans sanction (RSS). Pour l’instant, a poursuivi Etzer Émile, on sait que les Américains ont une longue histoire d’arrestation et d’expédition de nos drogues dealers, peut-être c’est une nouvelle ère pour la sanction de la corruption qui commence ».

PetroCaribe: vers le jugement de certains comptes par la CSCCA 

À l’exception des ministres, tous les comptes des ordonnateurs redevables par-devant la Cour supérieure des comptes dans la gestion du fonds PetroCaribe seront jugés, ont confié trois conseillers interrogés par le journal Le Nouvelliste fin février 2022. « Le délai pour la tenue des procès a expiré. On devait les juger avant la fin de l’année 2021 », avait indiqué l’un des conseillers avant d’égrener le chapelet des obstacles rencontrés. « Il y a eu un problème de rétention d’informations et d’absence de volonté de l’administration qui refuse de se soumettre aux principes de la bonne gouvernance et de reddition des comptes », avait-il fait savoir, expliquant qu’après la publication des rapports sur la gestion des fonds PetroCaribe, la Cour n’a pas encore reçu toutes les informations pour pouvoir effectuer des audits globaux des institutions et ordonnateurs. 

La CSCCA entend mettre les bouchées doubles pour finaliser les dossiers des ordonnateurs concernés. « Après, jugement », avait confié un autre conseiller, expliquant que certaines institutions avaient communiqué des informations incomplètes. « Nous n’avons pas pu organiser l’audit global souhaité », avait-il poursuivi, soulignant également les mises en place de la CSCCA pour « auditer toutes institutions publiques jusqu’au 30 septembre 2022 ».

Au début de la présidence de Jovenel Moïse, assassiné chez lui, le 7 juillet 2021, il y a eu une forte mobilisation populaire contre la corruption. Le président Moïse, en sa qualité d’homme d’affaires, a été éclaboussé par les rapports de la CSCCA ainsi qu’une kyrielle de ministres et d’autres ordonnateurs ayant servi sous les administrations de René Préval, de Michel Martelly et de Jocelerme Privert.

Source: Lenouvelliste

42 thoughts on “PetroCaribe: la loi Biden contre la corruption en Haïti fera-t-elle bouger les lignes ?

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