Haïti : L’intervention de la force kényane à Ganthier met en lumière les défis de la mission internationale.-
3 min readUne mission de sécurité internationale dirigée par le Kenya et soutenue par les Nations Unies, visant à restaurer la sécurité en Haïti, a mis en lumière ses propres limites après une intervention infructueuse à Ganthier, une localité rurale à l’est de Port-au-Prince. L’opération, destinée à reprendre le contrôle des zones sous l’emprise des gangs, a révélé des lacunes cruciales dans la planification et les ressources, compromettant l’objectif initial de sécurisation durable.
La mission, composée de 400 policiers spécialisés kényans, a été déployée pour soutenir la police nationale haïtienne après une attaque violente perpétrée par le gang 400 Mawozo. À l’arrivée des forces kényanes et haïtiennes, les membres lourdement armés du gang se sont enfuis dans les buissons, permettant ainsi à certains habitants, qui avaient fui, de planifier leur retour. Cependant, moins de 24 heures après cette intervention, les forces kényanes se sont retirées sans avoir repris le contrôle de Ganthier.
Le retrait rapide des troupes a permis au gang de revenir en force, pillant maisons et commerces, et promettant de nouvelles violences, notamment contre la localité voisine de Fonds-Parisien. Ce retour en arrière a semé la panique parmi les habitants, qui se retrouvent désormais en fuite, avec nulle part où aller.
Jean Viloner Victor, maire de Ganthier et de Fonds-Parisien, a déclaré que si l’intervention des forces kényanes n’avait pas eu lieu, la situation aurait pu être bien pire. Toutefois, il a ajouté que, malgré les efforts de la police, rien n’a réellement changé, et les habitants ne peuvent toujours pas rentrer chez eux.
L’intervention manquée de Ganthier met en exergue les insuffisances d’une mission internationale sous-équipée et mal préparée, selon Vanda Felbab-Brown, experte en sécurité au Strobe Talbott Center for Security, Strategy and Technology de l’institut Brookings. Felbab-Brown a critiqué la mission pour son manque de planification initiale, soulignant que les forces déployées n’avaient pas les moyens nécessaires pour sécuriser durablement les zones sous contrôle des gangs.
La mission kényane s’est également heurtée à des problèmes logistiques importants. Le porte-parole des forces kényanes a déclaré que le manque de soutien logistique, y compris l’absence de nourriture et de matelas pour les troupes sur le terrain, a forcé leur retrait prématuré. De plus, les véhicules blindés fournis par les États-Unis, dépourvus de tourelles, se sont révélés inefficaces pour affronter les gangs, ce qui a affaibli davantage la capacité de réponse des forces kényanes.
La situation s’est aggravée lorsque le chef du gang 400 Mawozo, Lanmou SanJou, a répliqué en coupant l’accès au pont Bonnet, un point stratégique reliant Port-au-Prince à la région frontalière. Cette attaque a bloqué les camions de transport, essentiels pour l’approvisionnement en produits et en fournitures, provoquant une paralysie partielle de la région.
Les habitants de Fonds-Parisien, confrontés aux menaces continues du gang, craignent que la situation ne dégénère encore davantage. Jean-Bernard Son, un leader local, a exprimé son inquiétude quant aux capacités des forces internationales à assurer la sécurité de la région, notant que le gang est non seulement bien armé, mais aussi bien financé.
Malgré la présence d’une nouvelle équipe de police, l’incertitude et la peur continuent de régner à Ganthier et Fonds-Parisien, les habitants se retrouvant pris au piège entre des forces de sécurité insuffisantes et les menaces de violence des gangs.
Cette intervention ratée à Ganthier souligne la nécessité d’une mission internationale mieux équipée et mieux planifiée pour répondre aux défis sécuritaires complexes d’Haïti, où les gangs continuent de représenter une menace majeure pour la stabilité du pays.
Source : Miami Herald